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Le conflit est-il inhérent aux organisations ?

Le conflit est-il inhérent aux organisations ?

Une organisation (entendons par là une entreprise, une administration ou encore une association) est structurée en vue de réaliser un objectif assurant sa pérennité et son développement : que ce soit en termes de chiffre d’affaires, de bénéfices ou de mise à disposition d’un service, on mesurera l’efficience de cette organisation par le prisme du résultat. Selon le succès ou les difficultés qu’elle rencontre, l’organisation sera souvent perçue comme un tout homogène, comme si tous les acteurs la composant regardaient dans la même direction. Pourtant, Les organisations regroupent des individus aux histoires, aux antécédents, aux personnalités, aux valeurs et aux objectifs divers, ce qui peut parfois entraîner des divergences d’opinions, des frictions et, bien évidemment, des conflits.

L’individu face à l’organisation

Les théoriciens Michel Crozier et Erhad Friedberg ont justement analysé en quoi les dissonances sont inhérentes à n’importe quelle organisation puisqu’elle est constituée d’« un ensemble de rouages compliqués, mais parfaitement agencés. Cette horlogerie semble admirable tant qu’on l’examine seulement sous l’angle du résultat à obtenir : le produit qui tombe en bout de chaîne. Elle change en revanche radicalement de signification si on découvre que ces rouages sont constitués par des hommes »1. Or, du fait des différences qui les caractérisent, ces hommes et ces femmes peuvent être considérés « comme des acteurs ayant chacun leur propre stratégie »2 et cette multiplicité de stratégies nourrit inévitablement la logique de conflit. Qui plus est, la nature même des organisations peut constituer un facteur aggravant : elles « ont besoin d’une structure hiérarchique, qu’elle soit conçue sur un mode pyramidal ou matriciel. Or, les rapports de place hiérarchiques, parce qu’ils sont par nature inégalitaires, sont aussi potentiellement conflictuels »3.

La promotion de la culture d’entreprise : la réponse à tout ?

La création ou le renforcement d’une culture d’entreprise positive sont souvent considérés comme un antidote aux divergences de vue et aux conflits sous-jacents. Pourtant, il faut pouvoir se dégager de toute vision simpliste, parfois reflet d’un positionnement de l’entreprise porté par le management, en incohérence avec les intérêts individuels des collaborateurs constituant organisation. Ainsi, renforcer le sentiment d’appartenance à l’organisation – soit par le prisme des valeurs, soit par celui de la satisfaction de la mission accomplie – est loin d’être suffisant pour éviter les conflits. Michel Crozier et Erhad Friedberg écrivaient déjà en 1977 : « (…) le fonctionnement d’une organisation ne peut plus correspondre (…) à la vue taylorienne d’un ensemble mécanique de rouages agencés et mus par une rationalité unique. Il ne peut pas davantage se comprendre comme l’expression de mécanismes interpersonnels ou d’impératifs fonctionnels qui assureraient « spontanément » la satisfaction des « besoins » d’intégration et d’adaptation d’un système dont la structure nous serait donnée au départ. L’organisation n’est ici en fin de compte rien d’autre qu’un univers de conflit, et son fonctionnement le résultat des affrontements entre les rationalités contingentes, multiples et divergentes d’acteurs relativement libres, utilisant les sources de pouvoir à leur disposition »4.

Le conflit dans les organisations : une fatalité ?

Cependant, il est important de garder en tête que tous les conflits ne sont pas nécessairement négatifs. Certains d’entre eux peuvent s’avérer constructifs et permettre à l’organisation de progresser, à condition que ces conflits soient gérés de manière appropriée et suffisamment en amont afin d’éviter le pourrissement ou le point de non-retour. Les divergences d’opinions et l’affirmation de valeurs nouvelles peuvent conduire à des idées novatrices, à des améliorations dans le quotidien du travail et à un mieux-être au travail qui se répercutera indiscutablement sur la bonne santé de l’organisation. Comme nous l’avions évoqué dans un précédent article, les directions, les élu(e)s du personnel mais aussi les salarié(e)s ont un rôle crucial à jouer dans la gestion des conflits. La médiation fait partie des procédures à mettre en place rapidement dans la résolution des conflits : les organisations ont besoin d’adopter une politique forte afin d’atténuer les effets négatifs des conflits.

  1. CROZIER M., FRIEDBERG E., L’acteur et le système, Éditions du Seuil, 1977, p.41. ↩︎
  2. Ibid, p.230. ↩︎
  3. PICARD D., MARC E., Les conflits relationnels, Presses Universitaires de France, 2008, p.110. ↩︎
  4. CROZIER M., FRIEDBERG E., L’acteur et le système, Éditions du Seuil, 1977, p.92. ↩︎

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